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La racine des inégalités

[#Finance]

Les partis politiques qui se réclament de gauche, acceptent sans broncher le caractère inégalitaire des intérêts bancaires qui sont pourtant la racine de l’exacerbation des inégalités de richesse et des inégalités sociales.

Il est un sujet qui n’est jamais remis en question par les économistes ou les hommes et femmes politiques dits de gauche. Il s’agit de la création monétaire.

La monnaie est le sang censé irriguer notre économie. Le principal but de la monnaie est de permettre la fluidité des échanges commerciaux et ainsi de donner de la vigueur à l’activité économique du pays.

Cependant, depuis une révolution qui s’est opérée au début du XIXe siècle, le pouvoir de la création monétaire a été accaparé par des institutions privées, qui en ont profité pour créer une monnaie à leur service : la monnaie-dette.

En effet, 90% de la monnaie créée n’est pas le fait de la Banque Centrale, mais celui de banques privées comme la Société Générale, ou la BNP. Celles-ci ont le pouvoir de créer de la monnaie au moment de l’octroi d’un prêt.

Ce pouvoir énorme abandonné par le peuple à des institutions privées est la racine même des inégalités de richesse. Pour illustrer ce propos, prenons l’exemple concret de l’achat d’un bien vital : le logement.

En ce moment, les taux d’emprunt pour un crédit immobilier d’une durée de 25 ans varient de 1,25% pour un couple riche, pouvant aller jusqu’à 2,75% pour un couple modeste.

Si ces deux couples empruntent 100 000 euros chez le même banquier, le couple aisé paiera, sur toute la durée du prêt, 16489 euros d’intérêts, alors que le couple plus modeste paiera 38396 euros !

Les plus modestes paieront donc un coût de crédit 2,3 fois plus élevé. Pourtant, ce besoin de logement est vital. Qui plus est, la création monétaire opérée par le banquier, est d’intérêt général, car le banquier ne possède en réalité qu’une partie infime des sommes prêtées. Le reste n’est qu’un jeu d’écritures comptables.

Certains diront à tort que l’argent prêté appartient aux banques et qu’il est dans leur droit de le prêter à qui leur semble. Il n’en est rien. Il est nécessaire d’insister sur le fait que 90% de l’argent prêté n’existe pas au départ. La banque a accaparé contre la volonté des peuples le pouvoir de créer la monnaie, et ne paye aucune redevance pour cela.

Quand tout va bien, les profits de cette activité est distribuée en salaires et en primes aux banquiers, et en dividendes aux actionnaires. Quand tout va mal, comme en 2008, les Etats sont obligés de sauver le système bancaire en endettant collectivement la communauté nationale.

S’en suit des politiques d’austérité : moins d’aides sociales, moins de services publics, plus d’impôts et de plus de taxes !

Après tous ces efforts consentis collectivement pour sauver les banques, les plus modestes, les « sans-dents », « ceux qui ne sont rien », sont toujours matraqués de frais bancaires, puisque d’après une enquête publiée en 2016 par « 60 Millions de consommateurs », les commissions pour incidents de paiements rapportent 6,5 milliards d’euros aux banques françaises. Soit le quart de leurs profits !

Revenons un instant sur le cas concret du prêt pour bien illustrer de quelle injustice il est question. Un couple riche peut facilement emprunter 100 000 euros sur 20 ans à un taux de 1,25%. Il paiera pour cela chaque mois 471 euros de mensualité.

Imaginons maintenant un couple modeste qui souhaiterait emprunter chez le même banquier, la même somme de 100 000 euros, et souhaiterait aussi la même mensualité que le couple riche, soit 471 euros.

Et pendant que les pauvres sont à la besogne…

Malheureusement, car c’est bien un malheur, son taux d’emprunt est plus élevé. Il faut donc rallonger la durée du crédit bancaire pour répondre à toutes ces exigences. Il faudra donc 25 ans et 4 mois au couple le plus modeste pour rembourser la même somme empruntée par le couple riche, avec la même mensualité, mais sur une période réduite à 20 ans !

La logique bancaire pousse donc le couple le plus modeste à travailler 5 ans et 4 mois supplémentaire, pour pouvoir avoir un accès à un droit vital : le logement.

Pendant que les pauvres sont à la besogne, les plus riches peuvent prendre des vacances, offrir des cours particuliers à leurs petits-enfants, avoir le temps des plaisirs culturels…

« Aucun parti politique ne remet en cause cette racine des inégalités de richesse. »

Au bout de deux à trois générations, les inégalités de richesses s’exacerbent, se transmettent de générations en générations, pour se transformer en inégalités sociales. Qu’en pense le peuple de gauche ?

Aucun parti politique ne remet en cause cette racine des inégalités de richesse. Ni même les partis de gauche dont l’ambition est pourtant de combattre des monstres abstraits, tels le libéralisme et le capitalisme. Le mal n’est jamais nommé de manière explicite : les intérêts bancaires inégalitaires. Et sans, peut-être, en être conscients, ces partis de gauche acceptent ce qui fait l’essence de ce qu’ils pensent combattre.

Ne pas désigner concrètement le mal permet le statu quo qui profite aux pouvoirs de l’argent en place. Cette logique bancaire est la racine du mal-être social. Sournoisement, cette logique concentre au fil des générations les richesses sur une minorité d’individus.

Cette concentration des richesses se traduit au fil du temps par une concentration du pouvoir politique et médiatique. C’est ce pouvoir de l’argent qui prend en otage nos démocraties.

Pour reprendre la main, le peuple se doit de récupérer le pouvoir de la création monétaire abandonné aux banquiers. Rien ne changera sans ce sursaut démocratique.

Par Anice Lajnef, (@Anice_L), ancien responsable trading dérivées actions dans plusieurs grands établissements financiers. 

Ancien responsable trading dérivées actions dans plusieurs grands établissements financiers, Anice Lajnef écrit sur la finance notamment. Il analyse les problématiques actuelles socio-économiques entre Londres et Paris et prône une économie équitable et responsable.

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