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Mérabha Benchikh, la révélation sociologique


« La sociologie, cela a été une révélation». Quand elle parle de son métier, Mérabha Benchikh est loquace. A 34 ans, cette chercheuse associée à l’université de Strasbourg, a fait toutes ses études à l’université de Franche-Comté (Doubs).

« Je fais partie du laboratoire Dynamiques Européennes mais mes travaux dépassent l’Europe », précise cette native de Besançon.

Spécialiste de la sociologie politique et du genre, Mérabha Benchikh a consacré sa thèse « aux trajectoires et carrières des femmes politiques ».

Ce champ couvre le militantisme, les appareils politiques, notamment.

« Je me suis penchée sur la France en menant beaucoup d’entretiens qualitatifs auprès de militants ou d’élus », explique t-elle. Elle a, d’ailleurs, publié « Femmes politiques: « le troisième sexe »? chez l’Harmattan, en 2013.

Tournée maghrébine

Dans le sillage de ses travaux, elle est invitée dans des universités au Maghreb. « Je suis intervenue à Kénitra au Maroc ou encore à l’université de Tizi-Ouzou en Algérie ». Thèmes abordés ? « Les questions de genre en politique ».

Une expérience qui sonne comme un tournant à l’écouter. Elle y reçoit, d’abord, « un très bon accueil même meilleur qu’en France », lance t-elle sans ambages.

Ensuite, « contrairement aux idées reçues qui décrivent ces sociétés comme traditionnelles et donc plus sexistes ou plus inégalitaires, je n’ai pas du tout ressenti cela, ni au Maroc, ni en Algérie », poursuit-elle.

« C’est vrai que c’était un public lettré avec qui il y a eu un vrai débat d’idées mais j’ai été frappée par la grande mixité de l’auditoire alors qu’il s’agissait de sujets dits Femme. Ce qui n’est pas le cas en France… ».

Croiser Louisette, figure de la résistance

Au delà des interventions, il y a aussi les rencontres fortuites mais qui relèvent presque du privilège. « En Algérie, j’y ai rencontré Louisette (ndlr Ighilahriz). On a logé dans le même hôtel lors du colloque Genre, résistance et négociation pour lequel je suis intervenue ».

Une chance car si elle est peu connue en France, Louisette fait partie de ces femmes qui ont fait la guerre d’indépendance.

En 2000, dans un article paru dans Le Monde, elle racontait comment elle avait été torturée de la 10e division (DP) gérée par le général Massu. L’article fera date dans l’histoire mémorielle de la guerre entre les 2 pays. On y comprend, pudiquement, que Louisette à été violée…

Une héroïne dont Mérabha Benchikh connaît l’histoire. « Elle s’est battue pour les générations futures. Elle m’a félicitée me disant qu’elle était fière de moi ».

Une rencontre clé pour la chercheuse. « Nous avons eu des discussions très profondes qui m’ont bouleversées ».

Du coup, Mérabha Benchikh, face à l’histoire de Louisette mais aussi de ces résistantes peu récompensées pour leur bravoure, « réfléchit à des sujets autour de parcours de vie de femmes d’Algérie et d’ailleurs », confie t-elle.

Sans trop en révéler, elle voudrait mettre le focus sur ces figures du Maghreb ou même de Scandinavie, une aire géographique qu’elle étudie aussi.

Une façon de mêler son expertise scientifique à son identité aussi. On y revient toujours.

Etudier le Maghreb, une assignation à sujets?

C’est peut être pour cette raison que Mérabha, la chercheuse, s’est tournée vers ces sujets. « Pourtant, au départ, je voulais sortir de ces questions, islam, banlieue, immigration…

Au début de ma carrière, j’ai voulu choisir des sujets d’étude différents loin de ce que je pouvais représenter et où l’on ne m’attendait pas spontanément ».

Echapper à cette forme d’assignation si vécue par les enfants de l’immigration.

Elle se tournera vers la vie politique puis le sexisme pour dépasser aussi les fantasmes.

« Finalement, le sexisme est plus invisible chez nous. S’il s’exprime de manière spontanée au Maghreb, chez les responsables politiques, le bourgeois français, il est plus pernicieux ». Et tout aussi présent.

Son œil aguerri de sociologue lui a apprit à restituer toute la nuance du terrain. Après tout, le sexisme n’a pas de nationalité. Son mode d’expression varie de manière complexe.

Cette prise avec le terrain, le travail social, c’est ce qui plait à cette adepte de l’Ecole de Chicago et la sociologie anglo-saxonne en général.

Ses parents et « la frustration relative »

Elle, qui se confronte, tous les jours à la précarité à cette France très pauvre, garde un souvenir très précis du travail effectué par ses parents immigrés pour hisser leurs 4 filles à des postes socialement reconnus.

« Mon père était ouvrier et ma mère tour à tour ouvrière, employée de ménage et en restauration scolaire ».

Si elle n’a pas vécu en HLM-« mes parents préféraient donner les trois quarts de leurs revenus dans le loyer d’un appartement en résidence »-elle évoluera dans un milieu modeste.

Et quand on lui demande comment ses parents ont fait, elle pointe « leur bon sens, leur intelligence malgré leur absence de diplôme. Il fallait travailler tout le temps.

Ma mère comme mon père -un homme syndiqué avec une vraie conscience politique- ont symbolisé des figures marquantes ».

Et d’ajouter, « ils étaient souples sur beaucoup de choses mais l’école c’était non négociable », insiste t-elle de sa voix douce.

Comme de nombreux immigrés, « ils ont toujours rêvé d’école, ils se rêvaient médecins ». Et cette phrase entendue, dans la bouche de son père, si souvent dans son enfance, « si j’avais eu la chance de naître en France, je serai devenu quelqu’un ».

« Une frustration relative », comme on dit en sociologie, qui a fonctionné. Ce « quelqu’un », c’est aujourd’hui Mérabha Benchikh.

Raconter, analyser, avancer.

Comments (4)

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