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Joselyne Umutoniwase, un dessein rwandais

Les fashionistas américaines ont découvert ses produits et adorent. A 30 ans, Joselyne Umutoniwase, designer et fondatrice de Rwanda Clothing Home, résume toutes les ambitions du Rwanda d’aujourd’hui. Portrait.

Sur le boulevard, ses deux boutiques, concomitantes, ont pignon sur rue. Pourtant, sa clientèle n’est plus à trouver. Avec Rwanda Clothes, qui a rapporté entre 120 et 150 000$ de chiffre d’affaire l’année dernière, plus qu’une marque, tout un concept, Joselyne Umutoniwase dessine le Rwanda d’aujourd’hui et de demain. Et l’exporte.

Un destin, qui comme bien souvent, puise ses sources dans la petite enfance de Joselyne.

Habile de ses mains, la fillette dessine, coud, allant jusqu’à customiser les cartables et uniformes de ses camarades de classe. Apprenant aux côtés de sa mère, la broderie et les autres arts de couture.

Tandis que son père lui transmettra le goût de l’entrepreneuriat. Très tôt, Joselyne a une assurance : elle sera business woman.

« Je voulais une boutique qui offre aux gens des créations, réalisées à la main, et personalisées. »

Et pourtant, c’est vers le cinéma qu’elle s’oriente dans un premier temps. « J’ai suivi une formation au centre cinématographique Kwetu, à Kigali, pendant deux ans. »

De là, elle partira en Allemagne pour suivre une formation. Mais une idée l’obsède : « Je voulais une boutique qui offre aux gens des créations, réalisées à la main, et personnalisées. »  

Mais en 2010, à son retour, elle se dit que c’est trop top. Que son pays, encore en pleine reconstruction, n’est pas prêt. Finalement, deux ans plus, après avoir mûri son projet, et gagné en confiance, encouragé par son époux, elle se lance et créé Rwanda Clothing home.

« C’est une marque qui s’intéresse au goût personnel des clients. On travaille avec le client, on l’écoute et on l’aide à exprimer sa personnalité,  à travers son style. »

Du sur-mesure au double sens du terme.

Les articles vendus sont customisés selon les goûts et le couleurs, et grâce à son atelier présent dans les locaux, les créations sont ajustées à la taille des clientes. Et des clients. Car depuis, la designer a développé des produits pour les hommes, pour les enfants, et dernier né de la gamme, pour la maison.

« Les Rwandais aiment être au top, bien sapés, différents des autres et pour cela ils sont prêts à en payer le prix ».

À savoir, entre 50 et 350$ le modèle. « Ce qui n’est pas à la portée de tous. Notre clientèle, c’est surtout la nouvelle classe moyenne, les expatriés, la clientèle de passage… »  

Et depuis peu, Joselyne exporte. Aux Etats-Unis et en Europe. Mais pour répondre à cette nouvelle demande, elle devra s’agrandir. Et la trentenaire voit grand.

« Dans le futur, on voudrait s’agrandir, aménager l’atelier au sous-sol pour agrandir la boutique, et recruter plus d’employés. Aujourd’hui, nous en avons 25. Mais on a besoin de plus pour répondre à la demande. Des magasins aux Etats-Unis et en Europe veulent acheter mes créations, mais pour répondre à leur commande, il me faut plus de personnel. »

Et de souligner : « L’exportation, c’est encore nouveau pour nous. Pour l’instant, une boutique aux États-Unis nous a commandé des vestes Safari, un style que nous avons développé ensemble.

En Belgique, on nous a demandé des combinaisons en pagne. Ça a très bien marché. Mais pour faire plus, je dois recruter et former. Il va nous falloir au moins cinq ans pour atteindre les 100 couturiers efficaces et formés. »

Car si Kigali compte des écoles de couture, les jeunes recrues ne sont pas prêtes à l’emploi. Ce qui est précisément dans le viseur des autorités nationales.

« Si je peux être considérée comme un exemple et contribuer au développement de l’industrie du vêtement au Rwanda et pourquoi pas en Afrique… »

« Le Rwanda aujourd’hui veut arrêter l’importation de vêtements de seconde main et développer notre propre production. Mais pour cela, on doit proposer à la clientèle locale des vêtements à prix moyen.

Or aujourd’hui on ne peut pas, compte tenu du prix de la main d’oeuvre. On ne peut pas concurrencer la Chine. Parce qu’on ne produit aucune matière première. Ni le coton, ni la soie. Tout est importé.

Notre pays est enclavé, le cout du transport est élevé. Ajouté à cela le savoir faire, moyen… Le gouvernement est en train de réfléchir à la manière de developper des formations plus pratiques, de développer des designers, des ateliers…  »

Sur le modèle de l’expérience de Rwanda Clothing.  « Le marché de la mode au Rwanda n’est pas encore très développé, il y a peu de maisons de création comme la mienne.

Pour quelqu’un qui veut démarrer ce n’est pas si simple. Mais si je peux être considérée comme un exemple et contribuer au développement de l’industrie du vêtement au Rwanda et pourquoi pas en Afrique…

Cela fait six ans que je travaille dans le vêtement en tant que business woman. Avec une expérience aujourd’hui reconnue. Si je peux ainsi contribuer à partager mon expérience…

En plus je paie des taxes, donc je contribue au développement économique de mon pays. »

Par Dounia Ben Mohamed, en direct de Kigali

Pour en savoir plus : https://rwandaclothing.com/

Raconter, analyser, avancer.

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