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Saïd El Boundati : « Écrire est à la portée de tous »

Saïd El Boundati


Saïd El Boundati est un virtuose. C’est, d’ailleurs, son surnom. À 34 ans, il vient de publier Rendez-vous au Beirut café (Edilivre), un deuxième roman, moderne et à la croisée des questions actuels. Journaliste, comédien et romancier, il multiplie les cordes à son arc.

N. H-M : Dans Rendez-vous au café Beirut, vous racontez l’histoire d’amour entre Ismaël, journaliste et Eléonore, une étudiante. Ce récit autour des couples mixtes est aussi une réflexion sur le sens des relations inter-sociales, interculturelles …

S.EB: Dans « Rendez-vous au Beirut Café », je vous emmène dans l’univers d’Ismaël, jeune journaliste d’origine maroco-libanaise en quête de l’amour pur et éternel.

Épaulé de son ami Isaac, il rencontre Eléonore qu’il contacte par le bais d’un réseau social.

S’en suit la rencontre au Beirut Café, sourires échangés, rires entremêlés, le frémissement d’une histoire possible…Sauf que les choses ne sont pas aussi simples dans une histoire d’amour.

Je porte un regard d’une curiosité insatiable sur le monde. Tout m’inspire, de la simple abeille qui butine une fleur pour en faire un délicieux miel à ce que peut exprimer le regard d’une femme croisée dans la rue ou encore « Waltz in A minor » de Chopin.

Par conséquent, il n’est pas impossible que des personnes qui font partie ou qui ont traversé ma vie se retrouvent un jour dans l’un de mes romans.

Dans ce roman, j’aborde des sujets engagés et de manière subtile. En effet, vous remarquerez que dans « Rendez-vous au Beirut Café », Ismaël musulman a un ami juif, Isaac, et tombe amoureux d’Eléonore, catholique.

N. H-M : Ce roman d’amour est très réaliste en même temps. Est-ce une œuvre engagée ?


S.EB: A travers ce roman, je dépeins une certaine réalité qui n’est pas celle que les médias mettent en avant mais qui existe et dont il faut parler ! Ce qui me bouscule aujourd’hui, c’est le manque de probité des politiques.  « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. ». Malheureusement, aujourd’hui, comme le dirait Nietzche : « Celui qui sait commander trouve toujours ceux qui doivent obéir » et « Être vrai, peu le peuvent »

N. H-M : En 2010, vous avez publié, Confession d’un mélancolique banlieusard, réédité depuis chez Gallimard. Il est question du désarroi du personnage principal, issu de la banlieue. Ce deuxième roman est-il une suite ?


S.EB: Mes deux romans puisent leur source dans ma propre expérience qui fait sûrement résonance à beaucoup de personnes avec un parcours similaire au mien.

Il y a dans mes manuscrits mon vécu, mais aussi mes questions en suspens et certainement une part de fantasme.

Le fantasme d’un moi, qui sait faire face au doute, qui a confiance en ses décisions. Un bon psychanalyste pourra certainement en apprendre beaucoup plus sur moi en lisant mes romans qu’en consultation classique (rire)… C’est peut-être le cas pour tous les auteurs.

Après je pense, qu’il y a dans mes romans de l’universalisme : la tolérance, l’amour, la jeunesse, l’évolution de l’être.

Mon premier roman « Confessions d’un mélancolique banlieusard » s’inspire de mon existence et plus particulièrement de mon enfance.

J’aurais voulu écrire et garder mes écrits pour moi, par pudeur très certainement. Ce sont mes proches, qui en lisant mes textes, m’ont encouragé à publier.

couv Beirut Café

N. H-M : Les réseaux sociaux occupent une place essentielle, finalement dans le récit. On pourrait parler de roman générationnel. A qui s’adresse ce roman?


S.EB: C’est un roman universel qui s’adresse à tous.

N. H-M : Votre style, épuré et ancré dans le réel, apporte beaucoup de fraîcheur au texte. Avez-vous des modèles dans la littérature ?


S.EB: Ce que l’on me reconnaît c’est un mélange d’humour et de références culturelles. Je vous parlais, plus haut, de psychanalyse. Je pense que l’écriture est pour moi une forme d’introspection. Même s’il y a une part d’imaginaire, celui-ci se nourrit des moments crus de ma réalité.

En écrivant ces deux romans, j’ai ouvert des placards à squelette dans mon esprit, souvent sans le vouloir, et j’ai cherché la sincérité. Je dirais donc que mes romans sont plus sincères que réalistes.

A travers mes romans, je dépeins une certaine réalité.  Ecrire m’a permis d’en savoir plus sur ce que je ressens et pourquoi aujourd’hui je me comporte d’une façon plutôt que d’une autre. Je pense que c’est cette complexité qui vient donner cet effet de « réalisme » à mon écriture.

N. H-M : Qu’est-ce que l’écriture romanesque vous apporte ?

S.EB: « Ecrire me permets de ranger le bordel qu’il y a dans ma tête ». Pour moi, l’écriture est quelque chose de personnel. J’ai besoin d’écrire d’une traite sans forcément en parler. Puis, je partage avec mes proches ce que j’ai pu produire. Mais, je suis toujours un peu méfiant.

J’ai peur d’être incompris ou qu’on veuille me donner « de bons conseils » qui vont m’agacer (rire). C’est le côté susceptible de celui qui créer (rire).  Plus sérieusement, j’écoute les conseils, mais je tiens à garder de l’autonomie sur mon travail et ne pas être influencé par un tiers. C’est pour cela que je présente le travail fini à mes proches.

Quand est-ce que je trouve le temps d’écrire ? Cela dépend. Je n’ai pas eu la même organisation dans l’écriture de mon premier roman que dans le second, et pour le troisième c’est encore différent. Il n’y a pas de règle dans l’écriture de romans. C’est ça qui me plaît aussi, pouvoir être hyper-productif, puis moins, m’écouter, faire comme j’ai envie.

N. H-M : Quand on vient d’un milieu populaire où l’autocensure « sévit ». Comment l’avez-vous contourné ?


S.EB: Je viens de la banlieue de Lille. En effet, malgré le succès de mon premier roman, on ne m’a pas couru après pour le second. J’ai toujours cru que publier un roman était inaccessible pour moi et je remercie les maisons d’édition, comme Mon petit éditeur ou Edilivre, qui m’ont fait confiance et qui m’ont aidé à combattre ce scepticisme. En définitive, écrire est à la portée de tous, il suffit d’une feuille et d’un crayon.

N. H-M : À l’heure où les tensions autour de l’identité s’accentuent, quel(s) message(s) souhaitez-vous faire passer à travers ce roman ?


S.EB: Tout le monde peut trouver des réponses en lisant un livre, quelques fois ça dépasse les volontés de l’auteur. Mais je dirais que pour moi le message principal est que quand vous êtes sûr de vous, n’hésitez pas à aller au bout de vos convictions.

Si vous avez un rêve, un désir, que pour vous le bonheur passe par un certain chemin, malgré les embûches, les difficultés, donnez-vous les moyens, ne capitulez pas.

Propos recueillis par Nadia Henni-Moulaï

Raconter, analyser, avancer.

Comments (4)

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    Cassandre

    Bravo Saïd. j’ai hâte de decouvrire tes autres romans.

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    Mathilde

    Mon coup de coeur de l’année. bravo pour ce roman Saïd.

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    Sabine

    Quelle belle plume ce Said !

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    Myriam

    J’ai commandé le roman sur le site d’Edilivre. Que dire si ce n’est une histoire formidable. On prend beaucoup de plaisir a lire ce roman.

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