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M. Bouteghmès : « Il faut élargir à 18 ans l’obligation scolaire »


[#Éducation]

Quand on débat du droit de vote à 16 ans, ne serait-il pas plus judicieux de discuter de l’école obligatoire jusqu’à 18 ans ? Surtout lorsqu’après plusieurs élections où le score du FN ne fait que croître jusqu’à arriver pour la deuxième fois en 15 ans au second tour de l’élection présidentielle.


Mehdi Bouteghmès, élu et professeur.

Quel usage est-il fait du vote ? Qui lui-même plus qu’un droit, est un devoir. Rappelons que pour garantir la démocratie, l’éducation au suffrage universel est indispensable, comme le pensait Jean Macé, fondateur de la Ligue de l’enseignement, il y a plus de 150 ans.




Il faut aller plus loin et militer pour élargir à 18 ans, (l’âge du vote), l’obligation scolaire. Actuellement, l’ordonnance du 6 janvier 1959 porte à 16 ans le terme de la scolarité obligatoire.


« Réformer l’école, c’est mettre en place un mouvement interne à l’institution républicaine. »



Mieux encore, l’État doit augmenter cette action de profondes mutations dans les programmes, les filières, les orientations, etc. sans crainte des impératifs budgétaires. Autant de points auxquels cette question mène.

Ce changement devrait s’accompagner de modifications du contenu scolaire. Réformer l’école, c’est mettre en place un mouvement interne à l’institution républicaine. 



En effet, plutôt que de se reposer sur ces acquis qui ont plus de 50 ans, nous nous posons cette question : si le vote est plus qu’un droit, pourquoi l’école obligatoire n’accompagne pas le jeune citoyen en formation jusqu’à la pratique du vote ?

>> LIRE AUSSI : Tournier, V. (2009). Comment le vote vient aux jeunes: l’apprentissage de la norme électorale. Agora débats/jeunesses.



Dans l’école, l’urgence est là, il faut agir.

Nous voulons que notre République soit réellement sociale, démocratique, laïque et indivisible. Le service public n’a pas le droit d’être défaillant là où on en a le plus besoin. Dans l’école, l’urgence est là, il faut agir.

Nous devons accompagner les citoyens et les décideurs, mais surtout accompagner les citoyens à être décideurs. 


La démocratisation de l’éducation, c’est faire des citoyens, c’est rendre accessible aux fonctions électives, mais aussi amener la transformation des institutions où les citoyens sont les garants directs de la République.



Les mouvements d’éducation populaire s’essoufflent

Il faut non seulement rappeler le rôle crucial de l’école, mais aussi préciser que le droit de vote est avant tout un impératif citoyen, qui n’est pas uniquement économique. 


Depuis quelques dizaines d’années maintenant, l’école subit cette pression de préparer plus à la vie active, à la vie économique, qu’à la vie sociale et politique.

Dans ce cadre, pourtant, les mouvements d’éducation populaire s’essoufflent. Ces mouvements ont porté l’avènement des lois scolaires et la base de ce qui fait l’école aujourd’hui. 


Ainsi, une véritable refonte de la politique publique de l’éducation ne veut pas dire simplement changer les âges obligatoires de scolarisation, mais également ce qu’on y fait à l’école et cela pourrait s’inspirer de travaux montrant, par exemple, que dès 3 ans, les enfants peuvent commencer à recevoir une éducation civique et, parfois même philosophique, digne de ce nom.

« L’ignorance est un cens »


Nous devons revenir au Plan Langevin-Wallon, qui fait cette proposition, en 1947. Ce plan n’a pas été appliqué, mais a servi d’inspiration à beaucoup de réformes, comme la scolarisation à 16 ans en 1959.

Non sans être nostalgique, ce plan propose les fondements de l’enseignement général, mais aussi concernant les droits du citoyen. L’enseignement proposé par ce plan aurait comporté des programmes communs et spécialisés, des horaires variables, des méthodes actives.

Il n’y aurait pas eu d’examen avant la fin de la scolarité obligatoire. L’éducation morale et civique aurait préparé « l’enfant à prendre conscience du rôle qui sera le sien dans la vie sociale et de sa responsabilité de citoyen ».


On peut réfléchir au vote obligatoire, à la reconnaissance de l’abstention et au vote pour les résidents étrangers. 


L’évolution des institutions ne passe pas nécessairement par un changement de régime, mais par une réflexion de fond de ce que doit être la République française.

C’est une république du 21e siècle qui en apprenant de son Histoire, la porte en avant. L’ignorance est un cens (l’impôt que l’on devait payer pour voter de 1815 à 1848), il empêche les citoyens de faire un choix. 



Dès lors que l’on pose ce principe l’Éducation nationale et les mouvements d’Éducation Populaire doivent tout faire pour que le suffrage universel direct ait un sens.

Professeur des écoles et conseiller municipal à La Courneuve (Seine-Saint-Denis).

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