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Race, couleur, religion, origine… Le profilage ethnique persiste en Europe


Le Conseil de L’Europe pointe la pratique du profil ethnique en Europe par les services de police. Des recommandations précises ont été formulées afin de prévenir les risques liés à ces pratiques discriminatoires et les violations des droits de l’homme.

Qu’est-ce que le profilage ?

Le phénomène n’est pas nouveau en France, comme dans l’ensemble des États membres du Conseil de l’Europe. Dunja Mijatović, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le définit en ces termes, dans le Carnet des droits de l’homme :

« Il y a plusieurs domaines dans lesquels le profilage ethnique peut se manifester plus particulièrement. Par exemple, les politiques publiques peuvent conférer des pouvoirs discrétionnaires excessifs aux forces de l’ordre, qui en font ensuite usage pour cibler des groupes ou des individus en fonction de leur couleur de peau ou de leur langue. Le plus souvent, le profilage ethnique est mû par des préjugés tacites, »



 

La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) définit le profilage racial ou ethnique dans les activités de la police comme « l’utilisation par la police, sans justification objective et raisonnable, de motifs tels que la race, la couleur, la langue, la religion, la nationalité ou l’origine nationale ou ethnique dans des activités de contrôle, de surveillance ou d’investigation.

Quelles sont les formes de profilage ?

Parmi ses formes les plus courantes : le recours aux procédures d’interpellation et de fouille à l’égard des groupes minoritaires et des étrangers.

Comment ? Elle se traduit par la multiplication des contrôles d’identité ou des interrogatoires de personnes ou de groupes aux points de passage frontaliers, ainsi que dans les aéroports, les stations de métro et les gares ferroviaires ou routières.

Par exemple, dans certains contextes, des individus appartenant à des groupes minoritaires ont été empêchées de quitter le pays dont elles sont ressortissantes.

Le système de justice pénale pratique aussi le profilage racial et ethnique.

« Les membres de groupes minoritaires se voient souvent imposer des sanctions pénales plus lourdes, parfois aussi en raison de préjugés implicites, qui sont de plus en plus perpétués par des algorithmes d’apprentissage automatique »,

 

 

explique le Commissaire aux droits de l’Homme.

 

Des contrôles ciblant les Arabes, les Noirs ou les Roms


En France, les jeunes hommes d’origine arabe ou africaine ont une probabilité 20 fois plus élevée d’être contrôlés et fouillés que tout autre groupe d’hommes, (selon les résultats d’une enquête nationale portant sur un échantillon de plus de 5 000 personnes).

Au Royaume-Uni, la police est tenue par la loi de collecter et publier des données ventilées sur ses pratiques en matière de contrôle et de fouille.

Les statistiques établies par le Home Office (ministère de l’Intérieur) sont formelles et montrent que pour 2017-2018 : les Noirs avaient 9 fois et demie plus de risques d’être contrôlés que les Blancs, en Angleterre et au pays de Galles. [

Quant au profilage ethnique des Roms, il constitue une réalité dans toute l’Europe.

Le profilage algorithmique dans la police « prédictive »

Les algorithmes d’apprentissage automatique jouent aujourd’hui un rôle clé dans les services de police et dans le système de justice pénale.

Cependant, leurs utilisations et leur efficacité interrogent. Ils suscitent de nombreux débats quant aux possibles abus et effets potentiellement discriminatoires.

Vie privée et reproduction des préjugés

Il est principalement à craindre que l’utilisation du profilage algorithmique n’entraîne, outre des discriminations, des atteintes au droit à la vie privée et à la protection des données.

Le groupe de réflexion britannique sur la défense et la sécurité Royal United Services Institute for Defence and Security Studies, reconnaissait que des systèmes d’apprentissage automatique comme HART reproduiraient inévitablement les préjugés véhiculés par les données qui alimentent ces systèmes, d’où un risque accru de ciblage disproportionné des minorités ethniques et religieuses, dans un rapport de 2018.


Définir et interdire clairement le profilage discriminatoire

Tant que ces algorithmes ne sont encore utilisés qu’à titre expérimental, le Conseil de l’Europe recommande l’adoption de lois claires définissant et interdisant clairement le profilage discriminatoire. Un moyen de limiter des pouvoirs discrétionnaires des membres des forces de l’ordre.


« Il faudrait aussi conseiller aux membres des forces de l’ordre d’expliquer pourquoi ils interpellent une personne, même si celle-ci ne leur pose pas la question, car une telle attitude contribue à éviter que le profilage soit perçu comme motivé par des préjugés et renforce ainsi la confiance de la population dans la police. »

 

 

Quand les médias stigmatisent

Les médias joueraient un rôle clé dans la diffusion des préjugés discriminatoires dans la sphère publique.


« Dans sa communication avec les médias, la police devrait veiller à ne pas diffuser et perpétuer de préjugés en établissant un lien entre, d’une part, l’origine nationale ou ethnique ou la situation au regard de la législation sur l’immigration et, d’autre part, un comportement délinquant. »

 

En cause également, le traitement médiatique de certaines affaires. Les médias auraient une fâcheuse tendance à donner une image stéréotypée des personnes appartenant à des groupes minoritaires, tels que les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile.

Des récits souvent fantasmés ayant des effets bien réels sur les stéréotypes. Ces pratiques alimenteraient à terme le racisme et la haine et « contribuerait à ‘normaliser’ des pratiques discriminatoires, dont le profilage ethnique ».

Rédactrice en chef de MeltingBook, formatrice éducation aux médias, digital & dangers du web

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